De leur temps 1/2 (les collectionneurs)

À la différence d’autres acteurs du marché (artistes, galeristes ou commissaires), les collectionneurs sont peu connus du grand public. Ils jouent pourtant un rôle essentiel dans la promotion et la diffusion de l’art contemporain. Une exposition triennale les met à l’honneur, l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne accueille le cinquième volet.

Une récente étude dirigée par le ministère de la Culture et de la Communication a révélé que le collectionneur français « type » était un homme (73%), âgé de plus de 50 ans (64%), ayant un niveau d’études supérieure à la moyenne nationale (75 % d’entre eux sont titulaires d’un bac+4), résidant en Île-de-France ou dans une grande ville. Au-delà des chiffres officiels, le terme recouvre des profils très différents. Parmi eux, deux catégories se distinguent : ceux qui ont fait de l’art leur métier (commissaires-priseurs, critiques d’art, curateurs, galeristes ou directeurs de leur propre établissement culturel – à l’instar d’Antoine de Galbert à la tête de la maison rouge –) et les autres. En outre, près de deux tiers des acteurs réunis à l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne collectionnent en couple (Florence & Daniel Guerlain, Gilles & Marie-Françoise Fuchs, Colette & Michel Poitevin… pour ne citer qu’eux). Relativement en retrait dans l’exposition, où seul leur nom apparaît sur un cartel, les collectionneurs s’expriment sur chaque pièce dans le catalogue publié à l’occasion.

Souvent collaborateurs étroits des musées et des centres d’art en tant que prêteurs (on estime que plus de la moitié des collectionneurs d’art contemporain prêtent des œuvres à divers musées), mécènes ou donateurs, les collectionneurs sont cependant rarement mis en lumière en leur sein (à l’exception de quelques expositions notoires comme Engagements : Collectionner / Partager au musée Sainte-Croix à Poitiers en 2015). L’exposition triennale de l’ADIAF s’inscrit dans la continuité d’initiatives pionnières comme l’exposition Passions privées qui s’est tenue au musée d’art moderne de la ville de Paris en 1995. En galeries, la donne est légèrement différente, les cartes blanches sont plus nombreuses (en vrac : Marty de Montereau à la galerie Sator, Thibault Poutrel chez Jérôme Poggi…). Un week-end leur est même dédié en mai.

vue de l’exposition Le temps de l’audace et l’engagement (de gauche à droite : Bernard Piffaretti, Laëtita Badaut-Haussmann, Patrick Bougelet et Jonathan binet) © Blaise Adilon. Courtoisie de l’IAC Villeurbanne

Organisatrice du prix Marcel Duchamp – une sinon LA référence en matière d’art contemporain en France –, l’Association pour la Diffusion Internationale de l’Art Français s’est fixée comme mission première de contribuer au rayonnement international de la scène française, elle regroupe aujourd’hui près de 400 collectionneurs actifs et engagés dans la diffusion de leur collection. À la suite des précédentes éditions qui se sont déroulées à Tourcoing, Strasbourg, Grenoble et Nantes, l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne présente le cinquième volet de la manifestation De leur temps.

Le lieu accueille 159 œuvres de 127 artistes, prêtées par 85 collectionneurs. En ne montrant qu’une à trois œuvres de chaque collection, l’accrochage ne permet pas de prendre la mesure de la qualité et la cohérence des ensembles réunis par chacun, ce qui est dommage. Néanmoins fort de son ampleur, de l’exigence de la sélection (à une ou deux exceptions près), l’exposition prend le contrepied des critiques contre l’art contemporain en général et la scène française en particulier.


< retrouvez le second volet de ce billet, centré sur les artistes, sur le blog >


Exposition Le temps de l’audace et de l’engagement – De leur temps (5) – les collections privées françaises, du 12 mars au 8 mai 2016, Institut d’art contemporain de Villeurbanne, 11 rue Docteur Dolard, Villeurbanne – entrée 6€/4€/0€